NOTHING MORE – Interview au Heavy Week-End

par | 11 Juil 2025 | INTERVIEW

⏱ Temps de lecture : 7 min

Dimanche 8 juin. Apothéose des trois jours du Heavy Week-End, une affiche à faire pâlir d’envie les plus grosses scènes internationales. 17h30, Nothing More ouvre le bal tel un Moïse fendant la mer, et vient littéralement balayer les derniers nuages qui traînaient dans le ciel de Nancy, pour y laisser apparaître leur puissance solaire sur tout l’Open Air, et au-delà. Rien que ça. 

 

NOTHING MORE

NOTHING MORE – Photo by Nicolas Keshvary

 

Vingt ans de rage et d’évolution maîtrisée

Nothing More, c’est ce quatuor texan formé en 2003 à San Antonio, dont le line-up se stabilise en 2011 autour de Jonny Hawkins — ex-batteur devenu frontman déchaîné — avec Mark Vollelunga à la guitare, Daniel Oliver à la basse et aux claviers, et Ben Anderson derrière les fûts. Après trois albums autoproduits, ils explosent en 2014 avec leur disque éponyme, propulsé par les tubes « This Is the Time » ou « Jenny ». Suivront The Stories We Tell Ourselves en 2017, Spirits en 2022, et enfin Carnal, leur dernier missile sorti en 2024. Un mélange de métal alternatif et de rock progressif, aussi lourd que cathartique, qui retourne tout en live. Sur scène, Nothing More c’est la folie incarnée : énergie du fond des tripes, décor mécanique impressionnant (le fameux « Scorpion’s Tail »), le tout servi par des textes puissants, spirituels et engagés. Résultat : un public conquis, qui ne décroche pas du début à la fin.

 

Carnal Nothing More

 

Quarante minutes de furie et de grâce

Leur set au Heavy Week-End, c’est une déflagration totale. Une intensité qui nous tient de bout en bout grâce au savant mélange des trois talentueux musiciens, dont on ressent la complicité, et du charismatique chanteur Jonny, toujours pieds et torse nus, recouvert de peinture noire et dorée (qui fait son petit effet « température relevée d’un cran » on ne va pas se mentir).

Tandis que dans le pit, la foule de t-shirts Slipknot s’échauffe pour la suite, oreilles et voix encore éclatées des précédentes journées, le groupe a déjà tout emporté sur son passage. On a droit à un final de malade, Jonny Hawkins perché sur les bras des gars de la sécu, martelant comme un possédé ses tambours tenus par le public, aux côtés de Mark et Daniel en transe. Quarante minutes, neuf titres, moments de grâce, palpitant qui pète à force de sauts en rythme, poils qui se hérissent, et à la fin le sourire comme un gosse d’avoir vécu ce miracle. Nothing More a mis la barre très, très haut, et peut se vanter d’avoir conquis de nouveaux cœurs par la même occasion.

On a eu la chance de les rencontrer juste après, en interview à chaud, les yeux toujours scintillants de leur feu communicatif.

 

Heavy Week End 2025 J 3 15

Photo by Nicolas Keshvary

 

Rock Sound : Comment vous vous sentez là, juste après le show ?

Mark ( NOTHING MORE ) : Vraiment super. C’était la première fois qu’on avait du feu sur scène dans un festival, c’était génial ! Vous avez dû nous voir sourire, trop contents, genre : « Ouais, on est trop cool, on a du feu maintenant ! ». C’était un vrai kiff. Super moment, super show, super public.

Jonny : J’aime toujours autant le public français ! On a toujours eu un bon feeling avec lui.

Rock Sound : Y a-t-il eu un moment marquant ce soir sur scène que vous garderez en tête ?

Daniel ( NOTHING MORE )  : J’ai vu un mec déguisé en banane faire du crowdsurfing, c’était vraiment cool ! J’adore les déguisements, c’est toujours fun (rires).

Mark : À la fin du concert, on est allés dans la foule avec Jonny à la batterie, pour faire le final. Il y avait tellement de gens qui faisaient du crowdsurf, qu’il fallait les éviter pour ne pas se casser la gueule, c’était absolument mémorable pour moi ! Tout le monde était à fond, c’était génial.

Jonny : L’esprit du public à ce moment-là était dingue. C’était franchement trop bien ! Voir les gens chanter les morceaux, lever les poings, sauter quand je leur disais, agiter les bras, tout le monde était réellement dedans. Et c’était un public tout neuf pour nous, parce qu’on avait surtout joué à Paris jusque-là. Aujourd’hui, on a vu plein de nouveaux visages se mettre à aimer notre musique.

Rock Sound : Vous étiez les premiers à jouer ici aujourd’hui, est-ce que vous avez encore le trac après toutes ces tournées ?

Jonny : Je dirais que ça dépend des shows. Pour certains, je ne ressens plus de stress du tout, mais pour d’autres oui. Par exemple, les concerts dans notre ville natale, oui, ou comme l’autre jour à Rock am Ring, où l’on passait à la télé. Quand il y a un petit truc en plus comme ça, ça reste dans ta tête et tu te mets plus la pression.

Mark : C’est un peu comme si on ne préfèrerait pas savoir c’est vrai, là, tu cogites et tu te dis : « Il faut que ce soit parfait ».

Jonny : Tout à fait ! On nous dit « Faites un super concert ! » et toi, tu te dis « ah ben maintenant c’est foutu ! » Tu te sens comme évalué.

Mark : Exact, et aujourd’hui on se sentait évalués quand même !

 

 

Rock Sound : Au sujet de votre dernier album Carnal, comment a-t-il évolué une fois sur scène ?

Mark: En commençant à jouer « House on Sand« , le fait de voir les gens chanter dessus, ça m’a fait quelque chose. En plus ce morceau a un breakdown qui est peut-être le plus lourd qu’on ait jamais fait, vraiment massif. Voir que ça marchait si bien, surtout en festival metal, c’est un peu comme dire : « Ouais, nous aussi on peut aller là-dedans ! ». J’adore ça (rires).

Rock Sound : Qu’est-ce que vous espérez transmettre en live avec cet album ?

Jonny : Peut-être une sorte de ressenti intense, spirituel. Mais c’est à la fois primal et spirituel, tu vois ? Il y a des groupes qui te font décoller, d’autres qui te plaquent au sol, qui te donnent cette énergie brute et agressive. Nous, on espère apporter les deux à différents moments dans les chansons. Et je trouve que cet album équilibre bien ces deux sensations. Alors j’espère que ça passe comme ça pour le public en live.

Rock Sound : Vos textes sont puissants et très personnels. Comment arrivez-vous à créer un lien avec le public, avec quelque chose d’aussi intime ?

Mark : Je pense que c’est simplement être honnête avec soi-même. Quand on écrit nos morceaux, on se pose toujours cette question entre nous, quand on tombe sur un passage et qu’on se dit : « ça, ça va vraiment parler aux gens. C’est puissant. Je le ressens. » Et je sais que d’autres l’ont ressenti aussi. On sait qu’ils ne sont pas seuls à vivre ça. On sait qu’ils sont déjà passés par là. Et je crois que pour nous, chaque fois qu’on trouve ce genre de paroles, on se dit : « Oui, je sais que ça, ça va frapper fort. » C’est clairement une chose qu’on se demande tout le temps. Je me souviens d’un mentor, il y a des années, Paco, avec qui on débattait souvent sur les chansons, qui nous demandait toujours : « Qu’est-ce que vous essayez de dire ? » Et nous, on lui expliquait en détail. Et lui, il répondait : « Dites-le, tout simplement. » Ça, ça m’a marqué. Ça a été un moment très fort pour moi en tant qu’auteur. Ne pas tourner autour du pot, mais aller droit au cœur, ou droit à la gorge.

Jonny : Je ne sais pas si ça répond vraiment à ta question, mais pour moi, le meilleur moyen de se connecter avec le public, c’est de ne pas du tout se soucier de savoir s’il va aimer ou pas. Je me livre complètement, sans penser au résultat. Je m’en fiche qu’ils aiment ou qu’ils n’aiment pas. Je fais juste ce que j’ai à faire, c’est tout. Et souvent, c’est ça qui attire, parce qu’ils te voient tel que tu es. Tu es authentique. Tu es toi-même, tout simplement.

Mark : Ouais, et surtout, ne pas avoir peur de se montrer tel quel.

 

Heavy Week End 2025 J 3 13

Photo by Nicolas Keshvary

 

Rock Sound : Si vous ne faisiez pas de musique, où est-ce qu’on vous trouverait aujourd’hui ?

Mark : Je serais probablement pilote de brousse en Alaska, à piloter un petit avion, à me poser au bord de rivières, à sauver des gens comme ça. Un truc de ce genre !

Daniel : Je pense que soit je bosserais dans un garage de pneus, soit je créerais des jeux vidéo ou un truc comme ça. J’adore les histoires, le développement de personnages… donc peut-être que je serais parti là-dedans. Un job avec des horaires stables et un peu de sécurité (rires).

Jonny : Je serais sûrement réalisateur de films ou dans un délire business, entrepreneurial, quelque chose comme ça.

Rock Sound : C’est quoi le dernier groupe que vous avez découvert et que vous kiffez ?

Daniel : j’ai découvert récemment un petit groupe anglais qui s’appelle Unpeople, je ne les avais jamais vus, jamais entendus, mais ils sont géniaux. Ils ont un album entier qui est vraiment top, et j’ai vu leur nom sur l’affiche du Rock am Ring à Rockham Park. Ils faisaient partie du festival, mais pas les mêmes jours que nous. J’aimerais vraiment les rencontrer un jour. Tout le monde devrait aller les écouter.

Mark : Pour moi, ce serait Bleed From Within, qui a sorti un nouvel album récemment. On est tous fans, et je me suis encore plus mis dedans avec ce disque. Super son, gros metal, c’est un groupe écossais.

Jonny : De mon côté, c’est un groupe français, Ashen, Je les ai découverts, je les ai mis sur ma playlist pour m’entraîner au sport, et là je me suis dit : « Mais ils viennent de France ! ». Du coup, j’ai commencé à discuter avec le chanteur en ligne pour peut-être faire un morceau ensemble à l’avenir, on verra ! En tout cas, groupe super cool.

Merci les gars et bravo pour le show !

Authentiques, électriques… et de retour à Paris

Nothing More, on ne s’en cache pas, on les adore. Parce que ce sont des musiciens hyper généreux, humbles, et surtout bourrés de talent. À la fois des bêtes de scène et des artistes profondément humains, qui te livrent tout : l’énergie, la rage, la sincérité. La bonne nouvelle, c’est qu’ils ne s’arrêtent pas là : en pleine tournée internationale, ils referont escale en France à Paris le 26 novembre prochain, à l’Élysée Montmartre. On s’y retrouve là-bas.

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