4/5 ⭐️⭐️⭐️⭐️
Lucie Sue était le cheval de feu de notre « top 5 paris français de la rentrée », on aurait dû miser bien plus qu’un bras. Après plusieurs singles qui nous ont mis l’eau à la bouche, Lucie balance son deuxième opus Battlestation. Résultat : un missile. Un disque qui griffe, qui transpire la détermination et ne laissera personne au sec.

Lucie Sue – Battlestation
La meuf qu’on avait vue venir, et qui explose tout
Quand on avait rencontré Lucie Sue au Hellfest pour une interview sous 36 degrés à l’ombre, elle nous avait balancé son mantra droit dans les yeux : « Don’t stop believing. » Elle sortait tout juste de son passage sur la Mainstage, qu’elle avait retournée à 11 heures du mat’ comme si elle y jouait depuis toujours. À ce moment-là, on savait déjà que Lucie Sue n’était pas juste une rockeuse prometteuse : c’était une femme en mission. Battlestation vient le confirmer en mode bulldozer. Lucie Sue ne porte aucun masque : survivre, créer, avancer, transformer ses blessures en riffs et ses galères en refrains, c’est sa façon de respirer. Elle compose, elle clippe, elle bricole avec trois bouts de ficelle dans des hypers ou sur des patinoires avec ses musiciens Mitch, Laura et Enzo, et en même temps, elle reste cette madame tout le monde qui prouve qu’avec de la rage et du culot, tu peux tout cramer sur ton passage.

Lucie Sue – Battlestation
Battlestation : riffs et autodérision
Dès le morceau-titre qui ouvre le disque, le ton est donné : Lucie Sue se dresse comme une guerrière prête à affronter ses démons et les nôtres. En l’occurrence, ces chers messieurs et leur incapacité chronique à nous faire grimper au rideau. Ça, c’est fait. Chaque note claque comme une pierre taillée par les vents du quotidien, tout comme « Hush », condensé de grunge 90’s où elle raconte avec humour noir et tendresse l’épuisement d’une maman solo. Le refrain tape facilement tel un hymne pour toutes celles qui essaient de garder la tête hors de l’eau. Et que dire du clip où ses enfants sèment un chaos total ? C’est à la fois hilarant, flippant et profondément touchant. Comment ne pas parler ensuite de « Ride The Wired Wild Tiger », ce délire glam metal partagé avec Satchel de Steel Panther. Le clip est une délicieuse parodie assumée, avec costumes kitsch et accessoires bidouillés à l’arrache. C’est drôle, c’est absurde, et en même temps ça sonne parfaitement. Parce que chez Lucie Sue, même quand ça rigole, ça joue vraiment.
Arrive le coup de pied au cul à la peur de vieillir « Burn Your Candles », comme un rappel à vivre sans compromis. Entre le solo de guitare façon Slash et la voix qui tremble de sincérité, on prend ce morceau comme une invitation à brûler la chandelle par les deux bouts sans culpabilité. « The Famous Last Words » te secoue de bout en bout et donne envie d’un joyeux pogo dans le pit ; trois minutes dix-sept de pure énergie brute parfaitement taillées pour le live et avec « Reckless », on appuie sur l’accélérateur dans un refrain qui te reste vissé au cerveau pendant des jours. Le clip, tourné dans un supermarché en pleine nuit, illustre parfaitement son art de sublimer le banal. Lucie Sue sait rire d’elle-même, elle sait tourner ses galères en dérision – et c’est exactement ce qui la rend irrésistible.
Armure scintillante et sincérité qui touche
Ce qui frappe, c’est la capacité de Lucie Sue à passer du heavy au violoncelle sans perdre son authenticité. Derrière les grosses guitares, il y a une sensibilité à fleur de peau. « Bela », morceau mystique aux touches orientales, vient calmer le jeu pour mieux te cueillir. « Knud » avec son écho venu d’ailleurs, t’emporte au milieu du far west dans une dimension parallèle, tandis que « 10 Minutes« s’habille d’arrangements cinématographiques et d’un violoncelle qui te serre le cœur. Enfin, « Counter Clockwise », avec ses percussions qui évoquent le tic-tac du temps, clôt l’album sur une note de réflexion presque méditative. Mais attention : si Battlestation ose les moments calmes, il reste avant tout un disque qui refuse les cases. « I Will Shit Where You Sleep » est un brûlot qui assume sa colère, « Boring » traduit le ras-le-bol d’une guitare étouffée, tandis que « Bachat Bouloud » part dans un délire jouissif, portant la voix de tous les traumatisés que nous sommes des classes de neiges pourries. Lucie Sue ne se bride pas, et c’est exactement ça qui fait la force du disque.
La pote qu’on voudrait tous avoir
Au-delà de la musique, il y a son parcours. Mère de deux enfants, survivante d’un mariage étouffant dans lequel elle ne se reconnaissait plus, elle a reconstruit sa vie avec la musique comme seule certitude. En trois ans, cette guerrière est passée des reprises maison sur YouTube à la Mainstage du Hellfest, puis à cet album qui sonne comme une victoire personnelle, et elle le fait sans faux-semblant. Écouter Battlestation, c’est un peu comme passer une soirée avec elle : tu rigoles, tu pleures, tu bois des coups, tu cries un peu aussi, et tu repars plus léger. Lucie Sue n’est pas une rock star intouchable. C’est une pote en armure à paillettes, prête à en découdre pour toi et avec toi.

Lucie Sue – Battlestation
Lucie Sue, la pierre est définitivement posée
On l’avait pressenti, et on ne s’était pas trompé : Lucie Sue s’impose aujourd’hui comme l’une des figures incontournables du rock en France. Dans un paysage musical où beaucoup se contentent de suivre les codes, elle les dynamite avec une sincérité désarmante. Et c’est exactement ce dont on a besoin : des artistes qui osent, qui s’exposent, qui donnent tout. Alors si tu veux un disque qui te fait headbanger autant qu’il t’émeut, si tu veux une rockeuse qui te parle comme une pote et qui joue comme une bête de scène, écoute Battlestation. Et file la voir en live – parce que Lucie Sue, c’est sur scène qu’elle achève de te conquérir.
Battlestation est disponible depuis le 29 août.
Release party au Dr Feelgood à Paris le 19 septembre, prochains lives à retrouver sur son site luciesue.com
À suivre sur Insta @iamluciesue