Les rumeurs étaient donc vraies et à la surprise du premier intéressé, Lionel Limiñana, le duo de Perpignan Limiñanas remplissait le 10 avril dernier son premier Olympia. Une consécration méritée pour Marie et Lionel qui enfilent depuis 20 ans les perles d’une discographie exigeante, intègre et pourtant d’une confondante simplicité.

Photo de David Poulain
Au vu du festival de guests sur leurs disques, se pose toujours la question de la restitution live de leurs morceaux et lorsque commence le show, le fan est en droit de penser qu’il va assister à un concert classique sans que cela ne soit péjoratif.
Rover tout-puissant, Bertrand Belin à l’élégance féline viennent déclamer sous les vivats leur participation du magnifique album Faded , si homogène dans son manifeste aux actrices maltraitées par toutes les industries du monde, qu’il nous vient subrepticement à l’esprit que les guests vont enchainer les morceaux dans l’ordre, façon concept album sans que cela ne soit gênant, d’autant plus que la jeune chanteuse Anna Jean qui interprète « Catherine », assure avec brio la première partie avec son groupe Juniore et que le guitariste rythmique imite à la perfection Bobby Gillespie quand à droite de la scène, virevolte le guitariste de Fleshstones, Keith Streng.
On s’attend à une mise en scène Lynchienne, pour qui Lionel avait confié son adoration et d’autant plus que vient de sortir une version augmentée de l’album pour le Disquaire Day.

Photo de David Poulain
Et puis, après « Je ne suis pas très drogue », Les Limiñanas reprennent le pouvoir qu’ils n’avaient jamais perdu. Fini les « tubes », ils décident à grand renfort d’un light show irréprochable de rentrer dans le dur avec des titres plus obscurs de leur répertoire et trois morceaux d’une dizaine de minutes chacun. En fait, Les Limiñanas se la jouent Cure : aux morceaux pop et courts succèdent les longs instrumentaux transis.
Pour la suite, tout dépend de votre rapport à la musique bruitiste : les uns trouveront que le groupe jouent les Neu! Mutants, d’autres qu’il se Suicide ! Le son n’est pas forcément des plus agréable avec des aigus crachotant rendant incompréhensibles les paroles du groupe et de Juniore en 1ère partie, à tel point que la chanson d’Emmanuelle Seigner est tout bonnement inaudible.

Un Bertrand Belin charismatique et acclamé ©Antoine Jaussaud
Pourtant, le groupe force l’admiration : le show est carré, pas une seule fausse note, un son lumière maîtrisé de bout en bout avec des projections de silhouettes inquiétantes et distordues, ainsi que cette assurance mêlée d’humilité qui fait la force des Limiñanas. Il n’en demeure pas moins que ce n’est pas le show que l’on imaginait voir même si celui-ci se termine sous les auspices du Velvet Underground « What Goes On » et un hommage appuyé aux couvertures du groupe de Lou Reed, une influence évidente sur l’album « Faded ».
Un concert à la fois déstabilisant et fascinant voire parfois angoissant lorsqu’au milieu d’instrumentaux dont il est impossible de connaître la profondeur nous séparant d’une rassurante surface, le spectateur se sent happé dans une spirale, celle de « De Pellicula », un album lui aussi ignoré par ce groupe désormais imprévisible. Le groupe sort de scène ravi, salue son public mais sans présenter ses musiciens qui n’ont pas démérité durant ces 90 minutes intenses. Dommage.

Photo David Poulain
En coulisses, Lionel peste : il galère à connecter sa playlist sur le Bluetooth de l’Olympia. Il confirme ne pas avoir voulu faire dans le show facile d’accès et avoir voulu prendre des risques. Et puis soudain survient un morceau de Neu!, son visage et celui de Marie s’illuminent et commence la distribution d’accolades. Comment ne pas les aimer, ces deux-là?
The Liminanas sur Instagram : @the_liminanas