Biffy Clyro – Futique

par | 19 Sep 2025 | Chroniques

⏱ Temps de lecture : 4 min

Il y a des albums qui résonnent comme un bilan et d’autres qui ouvrent des fenêtres. Avec Futique, Biffy Clyro signe leur dixième opus en transformant le temps qui passe en énergie neuve. Un nouvel opus où l’intime et le grandiose se confondent, chronique d’instants fragiles saisis avant qu’ils ne s’effacent.

Biffy Clyro - Futique

Biffy Clyro – Futique

Dix albums ! On n’y croirait pas mais c’est déjà le dixième album de Biffy Clyro. On en est là, installés dans nos vies, et pourtant, toujours cette secousse dans le ventre quand un nouveau Biffy Clyro déboule. Comme si le temps n’avait pas de prise, ou alors qu’il se pliait à leur musique. Et ils ne sont pas nombreux, les groupes qui tiennent encore debout à ce stade et qui continuent d’écrire des disques aussi pertinents et cohérents.

J’ai passé du temps à chercher la définition de ce néologisme.
Futique, ça veut dire quoi ? Kezako, Futiko ?
Futique, c’est peut-être ça : l’avenir qui s’entrelace avec le passé, une histoire d’amour qui n’en finit pas, même quand on croit avoir épuisé ses ressources.

 

Dès “Hunting Season”, la furie revient, brutale, presque insolente. Elle réveille ce qu’on n’espérait plus vraiment. La fraîcheur naïve des premiers émois n’est plus là, mais à quoi bon courir après, quand ce qui la remplace est bien plus tenace ?

Alors, trahissons cette idée moisie qui nous raconte que le charme des débuts s’évapore, car écouter Futique c’est se convaincre qu’il se transforme. Les refrains de “Shot One” en sont la preuve, efficaces, irrésistibles. Tout est là : les cassures rythmiques, les structures alambiquées, ces mélodies qui surprennent comme une phrase qui tombe au mauvais moment et pourtant éclaire tout.
Même quand Biffy frôle le mauvais goût sur “Dearest Amygdala”, tout est effacé par un final qui se hisse très haut. Comme les relations humaines, jamais lisses, toujours imprévisibles, mais traversées de fulgurances.

Biffy Clyro - Futique

Biffy Clyro – Futique

 

Et puis il y a ces paradoxes délicieux : “Goodbye”, presque sucrée, mais qui serre la gorge ; “Woe Is Me, Wow Is You”, qui hésite entre effondrement et éclat. Cette ambivalence, c’est le nerf du disque, beauté et tristesse mélangées au point qu’on ne sait plus où commence l’une et où finit l’autre. Comme si chaque chanson avançait sur une ligne de crête où la joie et la peine se confondent, où l’on ne sait plus si l’on sourit ou si l’on retient des larmes.

Futique joue avec cette vérité insaisissable. Les morceaux paraissent avancer vers l’avenir tout en se souvenant du passé, comme une relation qui continue de s’inventer malgré le temps, malgré l’érosion des premiers éclats. On croit entendre la fin, mais au détour d’un refrain surgit un élan nouveau, une énergie qui refuse de disparaître. Et c’est là que réside la force du disque : dans cette tension permanente entre la finitude et la persistance, entre l’ombre qui annonce et la lumière qui reste.

Le muscle, lui, reste galbé : “Frienshipping” cogne, rappelle que l’énergie n’a pas bougé d’un iota. Les guitares reprennent la parole, plus bavardes que par le passé, saturées, mathématiques parfois, comme au temps de Blackened Sky, leur premier album paru en 2002. On croirait qu’ils n’ont pas pris une ride. On en vient même à penser que, peut-être, la légendaire fontaine de jouvence existe et coule des jours paisibles à Kilmarnock, d’où nos trois Écossais ont germé.

 

 

Et puis, en cette fin de disque, le titre “Two People in Love”. Two people in love is a world in one. Une ligne simple, mais tout s’y condense. Le disque devient un miroir où deux personnes suffisent à créer un univers entier, avec ses éclipses et ses solstices, ses silences et ses grondements. Où le charme des premiers jours s’éteint peut-être, mais où l’incendie continue d’éclairer.

Avec Futique, Biffy Clyro prouve que leur musique, comme l’amour qu’ils y portent, n’obéit à aucune loi d’usure, et c’est ça, le secret. C’est refuser la fatalité, c’est croire qu’on peut réinventer l’étincelle à chaque disque, et nous, de repartir pour un nouveau tour de piste. La tête hoche et le cœur suit, comme à chaque première écoute d’un nouvel album de Biffy. On pensait avoir oublié à quel point c’est magique d’écouter un de leur albums a sa sortie et à chaque fois on se fait avoir. À chaque fois, on plonge.

Tant et si bien que, s’il y a des groupes qui vieillissent comme du bois sec, qui craque, s’effrite et se fend, il est important de rappeler à la face du monde que Biffy Clyro n’est certainement pas de ceux-là. Eux, vieillissent comme une flamme qui ne semble jamais s’éteindre. Elle danse autrement, mais elle brûle toujours. Et si Futique a un sens, ou au moins un but, c’est peut-être celui de nous rappeler que la fin n’existe pas tant qu’on reste incandescent.

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Simon Neil – Glastonbury festival 2025. Photo par Shane Anthony Sinclair/Getty Images.

 

FBiffy Clyro – Futique sort le 19 Septembre chez Warner Records

Style : Futique Rock

Site Officiel : biffyclyro.com
Instagram : biffy_clyro

Tracklist :
1 – A Little Love
2 – Hunting Season
3 – Shot One
4 – True Believer
5 – Goodbye
6 – Friendshipping
7 – Woe Is Me, Wow Is You
8 – It’s Chemical!
9 – A Thousand And One
10 – Dearest Amygdala
11 – Two People In Love