Limp Bizkit à l’Accor Arena : un joyeux chaos !

par | 9 Avr 2025 | À la Une, Live Report

⏱ Temps de lecture : 5 min

« Hé dis-donc, c’est quoi toutes ces belles photos de Limp Bizkit, Ecca Vandal et Karen Dio ? Ben, c’est le live report de Limp Bizkit à Bercy. Mais, euh, c’était en mars… oh mince, on l’a pas publié. » Alors pour réparer cet oubli de publication… le voici ! Le Loserville Tour à Paris, dans un Accor Arena chauffé à blanc avec un Fred Durst à bouclettes. 

Il a quelques semaines, Limp Bizkit, sur la fin de sa tournée Loserville investissait l’Accor Arena pour une soirée totalement portenawak avec non pas une, ni deux, mais bien 4 premières parties et même une petite cinquième vite fait. Il aura fallu patienter presque trois longues heures et les multiples interventions un rien pénibles d’un chauffeur de salle complètement barge avant de voir débarquer Fred Durst et sa bande. Mais l’attente en valait la peine…

 

Un live report de Caro @Zi.only.Caro, en immersion chez les dingos pendant 5h, pour une soirée riche en n’importe quoi, joyeusement foutraque et inégale mais parfaitement inoubliable. Avec David Poulain derrière l’objectif, au plus près de la scène pour Rock Sound.

Karen Dio Accor Arena 20250402 david poulain 096 1Karen Dio Accor Arena 20250402 david poulain 527 1

Karen Dio – Révélation pink punk

Il est 18h45 quand Karen Dió monte sur scène, devant une Accor Arena encore clairsemée qui semble hésiter entre apéro et repérage des toilettes. Pourtant, elle livre une performance explosive, à mi-chemin entre punk DIY et pop viscérale. Mais dès les premières secondes, elle impose son univers : un punk bubblegum effronté, entre Amyl and the Sniffers et Chappell Roan, porté par une énergie brute et une sincérité désarmante. Elle enchaîne les titres de son EP My World“Stupid”, “Cut Your Hair”, “Do It”, “Sick Ride” — avec une fougue qui tranche avec le format souvent trop calibré des premières parties.

Sa voix, parfois cassée, parfois cristalline, colle parfaitement à ses textes mi-rageurs mi-délirants. Elle saute, elle crie, elle parle au public comme à des potes. Et même si ses interventions résonnent un peu dans une salle encore vide, elle ne lâche rien. C’est sa première date en France, et elle la vit comme un manifeste. Une révélation, au sens propre.

@karendioxx sur Instagram

N8noface Accor Arena 20250402 david poulain 362 1N8noface Accor Arena 20250402 david poulain 347 1

N8NOFACE : Ovni sans mode d’emploi

N8NOFACE provoque un malaise quasi-théâtral. Seul face à son laptop, il hurle dans le vide, déclame des bribes de névroses sur fond de beats minimalistes. C’est radical, étrange, presque hostile. L’artiste semble en lutte avec son propre micro. On ne sait pas si on regarde un set ou une séance de psychodrame. Le public est figé, interloqué. Un OVNI, fascinant ou repoussoir selon l’endurance de chacun. Personnellement j’ai hésité à profiter du set pour aller me chercher une limonade, mais devant l’absence de lumière totale des escaliers à pic qui me séparaient du salut de mes oreilles et de mon âme… j’ai opté pour la sagesse d’attendre le prochain entracte pour m’exfiltrer de l’enfer.

 

Ecca Vandal Accor Arena 20250402 david poulain 565 1

 Ecca Vandal : le raz-de-marée

À 20h05, c’est au tour d’Ecca Vandal de prendre le relais. Et là, changement de ton : la Sri-lankaise, élevée en Afrique du Sud et installée en Australie, débarque avec un son massif, hybride, impossible à ranger. Punk ? Hip-hop ? Electro-rock ? Peu importe. Ce qui compte, c’est l’impact.

Elle déboule sur scène comme une furie, accompagnée de musiciens qui balancent des riffs tranchants et des beats lourds. Elle saute, hurle, se jette contre les crash barrières, s’offre un bain de foule express. Le public, jusque-là un peu amorphe, se réveille. On ne sait pas trop ce qu’on écoute, mais on le vit à fond.

Ecca Vandal Accor Arena 20250402 david poulain 513 1

Son set est court — 30 minutes — mais intense. Elle laisse une empreinte sonore et visuelle qui dépasse largement son créneau de première partie. Pas de temps mort, pas de compromis. Ça y est, les spectateurs sont enfin vivants. Son flow est dense, ses textes incisifs, sa présence hypnotique. La deuxième révélation de la soirée. Décidément, les filles raflent la mise…

@eccavandal sur Instagram

Ecca Vandal Accor Arena 20250402 david poulain 022 1

Bones : Trop de fumée, peu d’impact

Le duo trap-metal Bones arrive avec des visuels puissants — crâne géant, machine à fumée, ambiance post-apocalyptique. Mais le set peine à convaincre. Leur flow manque de relief, et malgré une énergie certaine, le public décroche. Beaucoup ont déjà entendu ce style, sans que Bones ne parvienne à le réinventer. On a l’impression d’avoir vu cette performance trois fois… hier. Quelques fans hochent la tête, beaucoup s’assoient. Une transition floue. On attend autre chose. On attend Limp Bizkit. Qui se fait désirer.

 

Riff Raff : Cinq minutes de chaos concentré

Et c’est le WTF tant espéré : Riff Raff déboule avec sa mini-voiture télécommandée, son débit mitraillette et son ego surdimensionné. Il ne reste que cinq minutes, mais il les vit comme si c’était une heure. Il hurle, rappe, gesticule. Un interlude complètement improbable mais rafraîchissant. La foule rit, crie, filme. Un ovni de plus, cette fois assumé.

 

Le chauffeur de salle… et la tour de verres

Entre chaque artiste, un MC improbable surgit. On nous dit qu’il s’agit de John Carnage, un faux animateur qui passe son temps à insulter la foule. « Vous êtes mous ! », « Paris, vous dormez ? », « Même ma grand-mère pogote mieux que vous ! ». Les réactions oscillent entre rires gênés et sifflets nourris. Il devient rapidement une caricature… puis un running gag. La foule répond à ses « fuck you ! » en lui jetant des verres vides à la figure. Le mystère s’épaissit… le gars va-t-il réellement se faire lyncher et finir par perdre son sang-froid ? Rien n’est moins sûr… Alors, pour tromper l’attente qui s’éternise, les fans s’organisent. Dans la fosse, une tour de gobelets s’élève — 1m80 de plastique, une œuvre collective née de l’ennui. Et soudain, tout le monde veut y contribuer. C’est beau, débile, et parfaitement dans l’esprit du moment. Un happening involontaire.

Limp Bizkit Accor Arena 20250402 david poulain 746

Limp Bizkit Accor Arena 20250402 david poulain 753

Limp Bizkit Accor Arena 20250402 david poulain 672

Le chaos commence. Limp Bizkit est là. ENFIN.

Enfin, les lumières s’éteignent pour de vrai. Le rideau s’ouvre sur un décor néon Vice City. Fred Durst surgit, perruque blouclée vissée sur la tête, furieux. Façon Père Noël vénère. Il crie “Break Stuff” sans préambule, comme pour libérer trois heures de frustration accumulée. Et le public explose. Pogo, cris, bière au plafond — c’est la déflagration attendue. Pas d’intro. Pas de mots. Juste du pogo.

La fosse explose. Les retardataires perdent leurs bières. Les anciens ados des années 2000 hurlent, pleurent, sautent. Et le set continue avec les classiques : “My Generation”, “Take A Look Around”, “Nookie”, et une reprise bouleversante de “Behind Blue Eyes”, chantée par un fan en larmes déguisé en cookie.

Limp Bizkit Accor Arena 20250402 david poulain 378

Limp Bizkit Accor Arena 20250402 david poulain 199

Deux fans montent sur scène pendant “Full Nelson”. L’une est déguisée en hot-dog et pousse un scream qui ferait pâlir Corey Taylor. Le public devient hystérique. Fred Durst fait des blagues absurdes, cite Woodstock 99, provoque la fosse. Wes Borland, à moitié cyberpunk à moitié mariachi sorti d’une fiesta WTF façon Dia de los Muertos, martyrise sa guitare dans un set visuellement hypnotique. Et DJ Lethal glisse un sample de “Careless Whisper” pour adoucir l’ambiance. Moment de flottement cosmique. La reprise de “Heart-Shaped Box”, version Limp Bizkit, choque autant qu’elle séduit. Entre hommage et pirouette, le groupe flirte avec l’irrévérence sans jamais sombrer dans la caricature.

Le groupe repart… et revient. Le vrai final, c’est un deuxième “Break Stuff”. Lumières allumées. Circle pit démesuré. Fosse en transe. C’est violent, libérateur, désordonné… et impossible à oublier.

Public Accor Arena 20250402 david poulain 124

Limp Bizkit Accor Arena 20250402 david poulain 592

La soirée n’était pas parfaite, loin de là. Trop long, trop de creux, trop de bruit inutile. Mais le concert avait ce truc rare : une personnalité, un grain de folie, une pulsation sincère. On en ressort à moitié sourds, vidés mais heureux. Des bleus sur les côtes, des souvenirs plein la tête. Il aura fallu de la patience… beaucoup, vraiment beaucoup de patience ! Mais la soirée a tout donné en retour : du son, du chaos, de la joie brute. Si tu n’y étais pas ? Tu as raté un sacré bordel. Si tu y étais ? Tu sais très bien pourquoi tu as encore ce gobelet sur ta table de nuit !

Limp Bizkit Accor Arena 20250402 david poulain 867

@limpbizkit sur Instagram