Trente ans de carrière et toujours aussi affamés. The Rasmus signe son grand retour avec Weirdo, sorti le 12 septembre, un album qui assume pleinement sa différence et fait exploser les compteurs : refrains XXL, guitares acérées, mélodies à fleur de peau. Le quatuor finlandais célèbre l’étrangeté comme un véritable cri de guerre : être soi, envers et contre tout. Nous avons rencontré le bassiste Eero Heinonen et le batteur Aki Hakala pour parler de ce disque sous haute tension, de leur lien indéfectible avec leur public et d’un concert en Ukraine qui les a bouleversés à jamais.
Rock Sound : Bravo pour ce nouvel album, on l’a adoré à Rock Sound. J’ai l’impression que cet album, c’est vous : The Rasmus poussé puissance 10. Les refrains sont plus accrocheurs que jamais, les guitares plus tranchantes, il y a des mélodies partout. Est-ce que c’est enfin le moment où le weirdo en vous peut s’exprimer totalement ?
Eero Heinonen (The Rasmus): Merci pour les compliments, ça fait plaisir à entendre. Je crois que tu as vraiment perçu l’essence de ce disque — et c’est merveilleux.
Aki Hakala (The Rasmus): Oui, ce thème du weirdo nous accompagne depuis un moment. Parce qu’évidemment, nous menons une vie « bizarre », un peu en marge : choisir d’être artiste, de ne pas suivre le chemin « normal ». Weirdo, c’est célébrer le fait d’être soi-même, sans essayer de correspondre à une norme. Personne n’est vraiment « normal » — chacun doit assumer son individualité. Les gens sont ce qu’ils sont, et c’est très bien comme ça.
Rock Sound : On peut y voir un acte de liberté, peut-être ?
Eero Heinonen (The Rasmus) : Oui, un acte de liberté, et surtout de courage. C’est oser être différent sans en avoir peur. Et en même temps, c’est rester ouvert : il y a de la place pour tout le monde sur cette planète. Il ne devrait pas y avoir autant de haine. Il faudrait plus d’amour, de compréhension, et la liberté de simplement être soi-même.
Rock Sound : Cette idée traverse l’album. Vous parlez du fait d’être musicien, de ce que ça a parfois d’étrange. Comment décririez-vous votre évolution entre vos débuts et aujourd’hui ?
Eero Heinonen (The Rasmus) : Quand on a commencé, on avait 15 ans. On était de vrais gamins, mais on rêvait déjà de voyager, de jouer dans des pays qu’on ne connaissait pas, devant des gens qu’on n’avait jamais rencontrés, et de créer un lien avec eux. On court toujours après ce rêve, d’une certaine façon. Une partie s’est réalisée, bien sûr, mais à chaque étape, on continue de rêver.

INTERVIEW – The Rasmus
Rock Sound : Parlons de votre public en France, où beaucoup vous ont découverts avec In The Shadows. Votre audience s’est renouvelée au fil des ans. Comment percevez-vous cette transmission entre générations ?
Aki Hakala (The Rasmus) : C’est vrai, notre public est très varié : des jeunes qui nous découvrent tout juste et des fans de longue date qui nous suivent depuis les débuts. Avec les titres de ce nouvel album, on voit arriver une génération qui ne connaît même pas In The Shadows. C’est un privilège pour un groupe qui existe depuis trente ans.
Les gens continuent d’écouter de la nouvelle musique et de s’intéresser au rock, et rien que ça, c’est déjà génial.
Eero Heinonen (The Rasmus) : Et nous, on ne pense pas trop à l’âge de ceux qui viennent nous voir. Quelqu’un de 26 ans, c’est jeune ou vieux ? Et à 38 ? On a 45 ans, et on n’en sait rien ! L’âge, c’est juste une barrière que les gens se créent. Être weirdo, ça n’a pas d’âge : tu peux traîner avec des plus jeunes ou des plus vieux, ça n’a aucune importance.
Rock Sound : Puisqu’on parle du côté weirdo, avez-vous des rituels avant de monter sur scène ?
Aki Hakala (The Rasmus) : Tu veux dire des trucs bizarres ? (rires)
Eero Heinonen (The Rasmus) : Non, il parlait de rituels !
Aki Hakala (The Rasmus): Ah oui ! Moi, j’ai besoin de me concentrer avant un concert. Ce n’est rien de secret ou de mystique, mais je veux être dans l’état d’esprit où chaque concert pourrait être le dernier. Ça me pousse à donner 200 % chaque soir. J’ai vu trop de groupes monter sur scène sans s’impliquer vraiment, et c’est terrible à voir. Pour moi, il faut être présent à 100 %, concentré, et mettre tout son cœur dans ce que tu fais.
Eero Heinonen (The Rasmus): Et juste avant d’entrer en scène, on aime se retrouver entre nous : chanter un peu ensemble, virer les mecs du label de la loge (rires), et ne rester qu’entre nous quatre pour trouver la bonne vibe. On se connaît depuis si longtemps que ce moment de connexion est vital pour l’énergie du concert.
Rock Sound : Aki, tu as dit quelque chose de fort : tu joues chaque concert comme si c’était le dernier. Ce n’est pas trop émotionnel à vivre ?
Aki Hakala : Parfois, si. Je me souviens du début de la pandémie : on devait jouer un festival à Mexico la semaine où tout a basculé. On a appris qu’un virus se propageait, qu’on pouvait en mourir, et personne ne savait comment on l’attrapait. On s’est dit : « Ce sera peut-être le dernier concert de notre vie. » Je me souviens que c’était très, très émotionnel. Et cet été, on avait décidé de ne pas tourner du tout. Puis on a reçu une invitation pour jouer à l’Atlas Festival, à Kyiv, en pleine guerre. On a dit immédiatement : « Oui, on vient. » J’ai vécu ce soir-là toutes les émotions possibles : j’étais heureux, triste, je pleurais, je riais.
On a rencontré tant d’Ukrainiens qui souffrent à cause de la guerre. La situation là-bas est terrible. Nous avons joué, mais nous avons aussi participé à des actions caritatives. Nous avons parlé avec des victimes — des jeunes, des enfants. Une fille, par exemple, a perdu sa mère dans un bombardement : elles étaient dans la même voiture, elle a survécu mais ses jambes ne fonctionnent plus. Sa mère est morte. C’était une déferlante émotionnelle, presque trop à encaisser.
Rock Sound : On imagine que ces émotions nourriront vos prochains morceaux.
Aki Hakala : Oui. Et après avoir vu tout ça, tu relativises. Tu ne te plains plus si ton café est trop chaud, après avoir vu la guerre en face.
Rock Sound : Ce que vous avez fait là, c’est héroïque.
Aki Hakala : Merci. Si vous avez l’occasion d’aider, faites-le. Ces gens ont besoin de soutien. Ça ne doit pas forcément être de l’argent : ça peut être des mots, des pensées positives pour l’Ukraine… mais surtout, n’oubliez pas.
Rock Sound : Une dernière question. Si The Rasmus devait écrire une bande originale de film, ce serait pour quel genre de film ?
Aki Hakala : Ça s’appellerait Nordic Noir ! (Rires)
Eero Heinonen : Mais grave ! Ce serait un film d’horreur, mais avec un côté psychologique. La musique metal et l’horreur font parfois bon ménage.

INTERVIEW – The Rasmus
Leur Nouvel Album de The Rasmus « Weirdo » est sorti le 12 septembre
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